Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain !
Veillons à ne pas précariser les salariés d’aujourd’hui sous prétexte que des transitions sont à l’œuvre.
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Tous les observateurs s’accordent à dire que nous venons de vivre une drôle de campagne électorale. De fait, cette campagne n’a ressemblé à aucune autre. Nous étions en droit d’attendre une bataille projet contre projet, susceptible de faire naître l’espoir dans chacun des camps. Au lieu de cela, nous avons traversé cette campagne au rythme des révélations et des scandales, des annonces plus ou moins fantaisistes et des dénigrements, qui n’ont fait qu’exacerber les craintes, le désespoir et la colère.
Veillons à ne pas précariser les salariés d’aujourd’hui sous prétexte que des transitions sont à l’œuvre.
Avec l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, la nomination d’Édouard Philippe à Matignon et l’installation de ministres, la France dispose d’un nouveau projet politique, qui suscite l’enthousiasme des uns, l’indifférence des autres et les craintes des derniers. On sait déjà que, parmi les premières mesures qui seront prises, figure la réforme du Code du travail, engagée par Myriam El Khomri sous le précédent quinquennat.
On sait aussi que le président souhaite demander au Parlement l’autorisation de procéder par ordonnances, afin d’accélérer le mouvement. Contrairement à ce qu’on a pu lire, cette procédure, pour peu qu’on en ait la volonté, peut laisser une large place à la concertation. Ce, avant le 18 juin, date du second tour des législatives, pour permettre aux partenaires sociaux d’appréhender les intentions du gouvernement, et dès que la nouvelle Assemblée nationale sera en fonction, pour peser sur le contenu des ordonnances.En tout cas, on peut compter sur la CFTC pour que le dialogue social ait la place qui lui revient et replace l’homme et son environnement au cœur du nouveau dispositif. Si les bouleversements en cours conduisent à la disparition d’emplois, il faut prendre le temps de réfléchir à ceux de demain, aux formations à mettre en place, aux revenus de substitution à inventer, à la rénovation de la protection sociale pour tenir compte des formes d’activité émergentes. Mais il ne faut pas pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain, c’est-à-dire précariser les salariés d’aujourd’hui, au bénéfice de ceux de demain, sous prétexte qu’un monde change et que l’avènement du suivant nous plonge dans l’inconnu. La difficulté des transitions que nous vivons aujourd’hui réside dans le fait de trouver le juste milieu, de ne laisser personne sur le bord de la route, de faire en sorte que tout le monde y trouve son compte. C’est le message que la CFTC entend faire passer ; c’est en ce sens qu’elle œuvre, fidèle à ses valeurs, pour introduire un supplément d’âme dans les relations sociales.
Philippe Louis
Président confédéral Pantin,
Le 24 mai 2017